Le couffin et le panier

Quand on a des beaux légumes dans un panier et un beau bébé dans un couffin, le rêve de tout parent est de nourrir le second avec le premier (l'inverse ne marche pas). L'idée est séduisante pour la jeune maman et encore plus pour le jeune papa qui peut trouver là le rôle nourricier que lui laisse peut l'allaitement maternel. Toutefois très vite ce bel élan rencontre des difficultés  comme celle du temps car la différenciation alimentaire se déroule souvent quand les parents ont repris le travail, ou encore le refus de certains enfants devant des nouveaux goûts... Alors voici quelques conseils pour nourrir son bébé avec son panier de légumes.
(Pour les plus grands, Les légumes et les enfants).

La panier et la diversification

Les légumes biologiques, frais, de saison, souvent de variétés anciennes et pleins de saveurs du panier d’une amap sont les aliments rêvés pour diversifier l’alimentation des bébés. Biologiques, ils sont exempts de pesticides. En circuit-court, frais et sans transport, ils n’ont pas subi de traitement de conservation comme les légumes de grande distribution. Biologiques, de saison et souvent issus de variétés anciennes, ils ont une richesse en nutriments et en saveurs bien supérieure aux autres légumes cueillis avant maturité, souvent gorgés d’eau et issus de variétés industrielles récentes dont la qualité nutritionnelle est moindre.

Bref, ils ont tout plaire aux bébés en terme de goûts et à leurs parents en terme de nutrition. A condition de leur faire découvrir sans faire d'erreurs. Il ne s’agit pas ici de voir dans quel ordre les présenter et comment doit se dérouler la diversification alimentaire. Ca ce sont les sages-femmes, pédiatres, médecins… qui vous le diront. Mais il existe quelques principes pour que cela se passe bien.
Découvrir de nouveaux goûts est compliqué non seulement pour les bébés mais aussi pour les enfants et trop souvent aussi pour les parents (Voir Les légumes et les enfants). Par rapport aux enfants les bébés ne doivent au début découvrir que des goûts, les textures viendront après : on commence donc sous forme de purées et compotes. De même il est important de faire des purées ou compotes d’un seul légume car un seul goût est plus facile à accepter que deux mélangés. De plus en cas de réaction allergique ou autre cela facilite le diagnostic. 

Ensuite, il ne faut pas oublier que le bébé commence par un aliment unique, le lait qui est sucré et gras. Il est donc intéressant de partir de ces deux goûts puis de s’en écarter progressivement. On commence donc par des légumes au goût naturellement sucré et qui ont assez de tenue pour donner des purées onctueuses sans avoir à rajouter autre chose : carotte, panais, petit pois, artichaut (souvent adoré des bébés à la plus grande surprise des parents), courgette, brocoli, chou-fleur… On peut ensuite évoluer vers d’autres goûts plus acides ou amers au fur et à mesure de l’acceptation des premiers. De même on peut passer à des légumes qui ont moins de texture comme des épinards en rajoutant un peu de pomme de terre pour que la purée garde une texture correcte. Enfin quand le bébé grandit, on peut passer progressivement de purées lisses à des purées fourchettes et des soupes puis à de petits morceaux en revenant sur des légumes déjà goûtés pour que le bébé découvre les textures.

Les beaux légumes du panier sont donc parfaits pour la diversification alimentaire mais il faut réfléchir un peu  à celle-ci car la découverte d'un nouveau goût est un apprentissage.

La découverte de nouveaux goûts et l'école de la confiance

La découverte d’un nouveau goût est quelque chose de long et très souvent les parents n’en prennent pas le temps. Les pédiatres estiment qu’un nouvel aliment doit être essayé au moins 8 à 10 fois avant que l’on sache s’il est aimé ou non. Bien souvent, on essaye une fois ou deux et l’on considère que l’enfant n’aime pas alors qu’il n’a simplement pas eu le temps de goûter et de découvrir. Il faut d’abord qu’il apprivoise la nouveauté, puis qu’il goûte avant d’aimer ou non une fois qu’il s’est habitué. Il y a donc des erreurs à éviter. On teste une fois, on force et on décrète qu’il n’aime pas. On tente le bon nombre de fois de suite dans une sorte de saturation. On lui présente, il trempe les lèvres n’en veut pas et on lui propose une autre purée qu’il aime tout de suite après.

Au contraire, on peut essayer deux ou trois nouveaux goûts sur une même période en les alternant à chaque repas jusqu’à les avoir fait tester chacun 8 à 10 fois. A chaque repas, l’enfant doit goûter le légume mais s’il n’aime pas après avoir goûté, ce n’est pas grave, il goûtera à nouveau le lendemain et on passe à la suite du repas prévu sans qu’on remplace la purée non mangée par autre chose. Il ne risque pas de mourir de faim mais simplement de manger un peu plus au repas suivant. En faisant ça le but n’est pas qu’il aime tout mais qu’il goûte sans qu’on le bloque par une crispation inutile qui ne serait pas contre le goût lui-même mais contre la découverte et la nouveauté. S'il peut goûter sans craindre de provoquer colère ou énervement, en confiance, il le fera car les bébés adorent découvrir et ne font même que cela dans tous les domaines. Si le nouveau légume signifie crispation et blocage avec la personne qu'il aime le plus, comment voulez-vous que la nouveauté ne devienne pas pour lui effrayante ou repoussante?
De plus pour peu que l'on prenne le temps de faire goûter en confiance, on s'aperçoit que la plupart des bébés aiment plus ou moins tout. C’est donc le plus souvent seulement une question de patience parentale. Un petit truc cependant : on commence toujours le repas par cette purée nouvelle (qu’elle soit fruit ou légume, l’ordre du repas à la Française ne compte pas trop pour les bébés) pendant que l’enfant a faim avant de passer au reste du repas. En effet les bébés mangent parce qu’ils ont faim et ne mangent plus quand ils n’ont pas faim, habitude évidente mais bien trop souvent perdue chez les adultes.
Deuxième remarque importante : le progrès n'est jamais linéaire. Il se peut qu'à des moments l'enfant découvre avec plaisir puis qu'à d'autres il accepte moins la nouveauté. Il faut respecter cela car souvent ce refus de la découverte peut venir d'autres facteurs et principalement d'une intranquillité du bébé face à des changements dans sa vie qui font qu'il a besoin de retrouver des repères et qu'il l'exprime au niveau alimentaire, un des rares domaines où, ne parlant pas ou peu, il a quand même son  mot à dire en ouvrant ou pas à la bouche. Dans ce cas-là, on ne se crispe pas non plus, on retente patiemment jusqu'à ce que cela revienne. Mon fils aîné qui mangeait de tout  a eu vers ses 18 mois une période où il mangeait toujours bien à la crèche mais où le soir avec nous il n'acceptait que de la semoule. Sa soeur allait naître et nous venions de déménager : assez de perturbations. On a laissé passer trois semaines de semoule en lui proposant toujours de goûter puis c'est passé comme c'était venu et il s'est remis à manger de tout. 
Découvrir de nouveaux goûts est donc un apprentissage et un des plus importants dans la vie du bébé. Comme tout apprentissage il implique la patience de celui qui accompagne et la confiance de celui qui apprend. C'est aussi l'occasion comme tous les actes simples de la vie du bébé de tisser petit à petit ce lien fort qui permettra à l'enfant d'avoir confiance en lui.

Faire vite et bien

Il est très important que la cuisine nécessaire pour nourrir votre bébé soit rapide et facile pour qu'elle ne soit pas un surcroit de travail vécu comme un sacrifice : "c'est du travail mais je fais ça pour son bien". Soit Mère (ou Père) Courage va s'essouffler, soit cela va dramatiser le repas et lui donner un enjeu relationnel ou sentimental qu'il ne doit pas avoir. Si l'enfant repousse sa purée, c'est peut-être qu'il n'aime pas, qu'il est surpris, qu'il n'a pas faim... plein de raisons tout à fait acceptables. Si vous vivez comme un sacrifice de lui avoir préparé, vous risquez d'en vouloir après à l’enfant qui ne comprend pas l’amour, la patience et l’abnégation que vous avez mis dans ce petit plat qu’il va repousser vous donnant le sentiment de vous repousser tout entier en même temps. Bref une relation alimentaire faussée qu'une cuisine simple et facile peut éviter.

Pour cela, il y a 3 alliés de poids : l’organisation, le congélateur et le cuiseur vapeur-mixeur type Babycook.
L’organisation et le congélateur tout d’abord. Si on doit faire goûter plusieurs fois sur un laps de temps d’une semaine, on prépare la purée d’un légume en une fois et on en fait pas trop : les quantités consommées lors de la phase découverte sont souvent très faibles, bien plus faibles qu’on ne le pense. On en met un peu au frigo pour les deux jours qui suivent et le reste au congélateur en mini-dosettes c’est-à-dire en bac à glaçons. On a ainsi de petites portions qui sont rapides à décongeler à température ambiante et on peut moduler ensuite la quantité en fonction de l'appétit et de l'âge. Pour ne pas mutliplier les bacs à glaçons, il suffit de faire congeler dedans puis de démouler et de remettre dans un sac congélation les glaçons de purée. On a ainsi préparé les purées de 3 légumes différents à faire goûter pendant la dizaine de jours qui suivent en alternant les goûts. Cette répétition des goûts peut sembler triste à un adulte mais elle permet à l'enfant de découvrir.

Le cuiseur vapeur - mixeur type Babycook (voir 2e photo) est un outil indispensable, je pense et je ne suis pourtant pas un fan de l'électroménager (voir Les outils du panier). Il faut d'ailleurs prendre le plus simple possible mais de bonne qualité pour qu'il dure surtout si vous avez plusieurs enfants. Le principe est d'avoir un seul appareil pour cuire à la vapeur et mixer ensuite le tout et un appareil se lavant en une fois et facilement. 
On prend des légumes que l'on lave bien, que l'on épluche pas car c'est un gain de temps que permettent les légumes bio et frais d'un panier. L'épluchage n'est nécessaire que pour les peaux coriaces à la cuisson. Pour les autres et comme on va mixer, pourquoi se fatiguer et perdre en plus des vitamines. On coupe ensuite en petits dés (plus c'est petit, plus vite c'est cuit) et on remplit dans le panier vapeur, on faire cuire selon le mode d'emploi du modèle acheté (le plus souvent, de l'eau dans le réservoir et on met en route et ça s'arrête tout seul). On sort les légumes et on garde l'eau de cuisson. On remet les légumes dans le mixeur et on mixe en rajoutant un peu d'eau de cuisson pour lisser la purée et avoir la consistance que l'on souhaite. C'est fini, prêt à manger, à mettre au frigo pour une petite partie et au congélateur en bac à glaçons pour le reste.
Lavage, coupe des légumes et mixage  : moins de 5 minutes de travail et 10 à 15 minutes de cuisson que l'on  ne surveille pas. Plus facile ce serait abuser. Dans le genre organisation plus poussée, on peut aussi préparer deux autres légumes pendant que les deux premiers cuisent et enchainer les 3 cuisssons. Avec 1/4 d'heure de travail et 3 cuissons, on a ainsi préparé les purées pour 10 jours en phase de découverte.
Mère ou père Courage peuvent aller se rhabiller : cest juste moins d'efforts que d'aller au supermarché acheter  des petits pots, et quelle satisfaction... C'est tellement simple que l'enfant peut vous les cracher dessus en vous montrant que c'est dégoutant sans même que cela vous vexe, et, ça, c'est important parce que ça arrivera.

A l'heure où la cuisine est devenue art et spectacle (télévisuel), beaucoup risque d'être déçus par cette simplicité culinaire mais elle est importante. Faire simple est essentiel pour que l'enfant découvre facilement des goûts simples. Au début on ne sale même pas comme vous l'avez vu. C'est meilleur pour la santé et ce n'est pas nécessaire car ce n'est pas un goût attendu par l'enfant, ce qui fait que ces purées peuvent paraitre fades aux adultes. Elles ne sont pas fades, elles ont juste le goût du légume sans le goût salé que doit avoir tout aliment depuis la nourriture industrielle. De même la liaison est faite avec l'eau de cuisson car il n'y a pas besoin de lier avec un corps gras comme on le fait pour les adultes. Il suffit de bien choisir les légumes voire de rajouter un tout petit peu de pommes de terre pour avoir une purée lisse. Cette manière de faire pourrait d'ailleurs faire réfléchir et faire évoluer la cuisine que l'on fait pour les adultes.
Au fur et à mesure que l'enfant grandit, on peut saler un petit peu, lisser la purée avec un peu de lait, un peu de crème, de beurre, de fromage. Jamais dans l'idée de rendre bon le légume ou de le cacher mais seulement au service du goût du légume.
En ce qui concerne la viande qui fait aussi partie de la diversification, plus tardivement, je déconseille la cuisson de la viande dans le babycook en même temps que les légumes. On obtient un goût très fort de viande bouillie et le mélange mixé est digne gustativement d'un mauvais petit pot. Il est aussi simple et bien meilleur de prendre un peu de viande cuite pour les grands (plutot au centre du morceau pour éviter les graisses brulées du pourtour), de la mixer et de la rajouter à une purée ou à des légumes écrasés. 

Le panier permet donc de nourrir facilement son bébé avec des légumes meilleurs tant pour la santé que pour le goût, ce qui rend la découverte des goûts plus facile par l'enfant. Tout cela peut se faire avec très peu d'effort mais au contraire beaucoup de plaisir si l'on s'organise un petit peu. Toutefois il faut garder plusieurs choses à l'esprit pour que la diversification et le début de l'alimentation solide se passe bien. Découvrir de nouveaux goûts n'est pas facile pour l'enfant mais il sera ravi de le faire car il aime découvrir s'il se sent accompagné et en confiance. Cela nécessite de la patience des parents car cela prend du temps. Il faut ensuite éviter toute crispation et ne pas prendre les choses personnellement : quand un bébé ne mange pas votre purée, ce n'est pas vous qu'il rejette. Enfin il est presque impossible de faire manger un enfant qui  ne veut pas, il faut juste qu'il goûte à chaque fois sans affrontement, en confiance.

Avril 2017

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